Dès mon plus jeune âge, je m'imprégnais de culture américaine par la musique, par la littérature. Une façon de m'échapper de mon quotidien ? Une attirance, une curiosité pour tout ce qui était nouveau, expérimental ? Une façon de se tourner vers l'autre côté du monde, l'Ouest, alors qu'on sortait d'un chaos venu de l'Est, de la seconde guerre mondiale d'où mon père, incorporé de force sur le front russe, était à peine revenu du camp de Tambow...
Toujours est-il que très vite, j'écoutais The Doors, Jefferson Airplane, Frank Zappa, Grateful Dead et je me plongeais dans les livres de Jack Kerouac, Jerry Rubin, Walt Whitmann, William Burroughs et les revues françaises qui en faisaient l'apologie comme Actuel. Bien sûr, j'avais quelques longueurs de retard car on était en 1965-1970 et Kerouac avait publié son livre culte dix ans avant aux USA. Mais il y a toujours eu un décalage de temps entre ce qui se passait de l'autre côté de l'Atlantique et la France. L'été je travaillais à cette époque dans l'usine textile Berglas Kiener, là où travaillait aussi mon père, qui aurait eu toutes les capacités pour faire prof mais que la guerre avait cassé et à son retour, les "bonnes" places avaient été prises par les collabos qui étaient restés en Alsace en faisant allégeance aux nazis ou qui avaient réussi à se réfugier en zone "libre" grâce à leur argent. Plus jeune encore, je travaillais l'été aux champs à Kunheim chez une tante et on passait des bons moments avec les "cousins" après les journées de labeur aux champs. Mais là, adolescent, c'était la vie d'usine à Colmar (là où est le campus aujourd'hui, coincidence !). Je me faisais un pécule qui me payait mes études et mes voyages...
J'avais lu tout Kerouac (j'ai même étudié "on the road" plus tard à la fac en " littérature et civilisation américaine", seul module que je suivais régulièrement, étudiant) et j'étais fasciné par ce concept de voyager avec peu d'argent en faisant de l'auto-stop. D'une famille ouvrière, pour voir autre chose, il fallait du courage, de la curiosité et bouger....
KEROUAC donc fut mon "exemple" dans sa façon de vivre et de voyager et dès que j'eus assez d'argent pour traverser l'Atlantique en avion, je me suis retrouvé sur les routes américaines à traverser ce pays immense de New-York à San Francisco, en passant par l'Arizona, le Nouveau Mexique.....Dix ans plus tard, je suis retourné y vivre, à La Nouvelle Orléans pendant deux ans !
Aujourd'hui, je me suis mis à relire "Sur la route" et j'y vois avec mon regard de maintenant ce qui a pu me fasciner et tout est encore si actuel.
Jack Kerouac, issu d'une famille modeste franco-canadienne rencontre très vite à 22 ans (après avoir été marin pendant la deuxième guerre mondiale) à New York William Burroughs, Allen Ginsberg et bien d'autres figures de ce qui deviendra la "beat generation", les beatnicks ! Il publie son premier livre The town and the City en 1950, mais son roman le plus connu, écrit sur un rouleau de papier de 40 m de long, ne paraît qu'en 1957 et raconte ses aventures en stop à travers les Etats-Unis. Jack Kerouac voyagea plus tard à Tanger (j'ai aussi habité 2 ans au Maroc-coincidence ?), Paris et Londres et, de santé fragile, mourrut jeune à 47 ans en 1969.
Un de ses derniers romans a le titre de "Satori à Paris" et ce terme du boudhisme zen japonais va très bien avec cette quête de l'errance qui n'en est pas une, mais qui est plutôt une confrontation à ses limites et sa liberté personnelles pour arriver à un éveil "spirituel" (pas au sens restrictif religieux), une compréhension de ce qu'est la vie, cet état transitoire ou on avance tout le temps.
Il faut relire "Sur la route" aujourd'hui, se laisser emporter par cette écriture dynamique, un conte qui n'a pas perdu une ride, une histoire de rencontres, de délires, de recherche de soi, de ses limites, au-delà des "murs de la perception", un roman qui est si contemporain, actuel et qui en surprendra plus d'un-e surtout si vous ne l'avez jamais lu. Et même si, comme moi,vous l'aviez lu il y a longtemps, vous serez surpris par l'effet que cela vous fera aujourd'hui....
On le trouve "en poche" et donc c'est un investissement modeste pour un plaisir énorme....
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