lundi 18 novembre 2019

CONSOMMER MOINS, RéPARTIR MIEUX


« Il est où le bonheur ? » s’interroge François Ruffin, titre de son dernier livre. Le journaliste-député après sa tournée des ronds-points (« j’veux du soleil ») a rencontré des jeunes de « Youth for Climate » et propose des perspectives pour agglomérer les différents combats sociaux et climatiques dans un Front Populaire Ecologique.

On peut discuter longuement du réchauffement climatique, on peut discuter longuement du réchauffement social, mais on ne pourra pas longuement nier qu’ils ne sont pas là !
« Anthropocène », « fonte de la banquise », « acidification des océans », « sixième extinction des espèces », « rapport du GIEC », « accord de Paris », « collapsologie »,...les jeunes, ou du moins un certain nombre d’entre-eux, ont intégré tous ces constats, ces déclarations depuis un moment et on aurait tort de les considérer comme des gamin-e-s, car eux, la planète en danger, ils sont nés avec, ils grandissent avec... « Une formidable maturité,...mais mêlée ...à une candeur politique... ». Ce qui est détruit ne se reconstruira pas. On a beau alerter, manifester en nombre, les décisions en restent au niveau des mots, disent-ils. « Au cri de Tous ensemble, ils veulent nous faire embrasser nos tyrans ». « Puisqu’ils nous menacent, on va les menacer, ...on n’a pas le choix….on a des amis qui se préparent à la violence » . Voilà un cheminement de l’esprit actuellement avant un possible passage à l’acte. Et la tendance est la même pour une partie des Gilets Jaunes, probablement. Des mouvements qui cherchent la « meilleure » voie vers l’action, mais qui ne peut être « ni l’opportunisme, ni le meurtre ».

Alors, on fait comment ?




« Des luttes pour des lois, et encore des luttes pour faire appliquer les lois. » « Bref, il nous faut gagner dans les urnes. Et aussitôt après, la rue, la rue, la rue. Sinon, quoi ? Sinon, rien. »
Le présidentialisme a tué tout espoir de démocratie. La démocratie, c’est autoriser le conflit. Nous sommes tombés dans une résignation, une absence d’espérance, tellement nous sommes phagocytés dans nos têtes par la propagande, la peur, leur puissance. Mais l’histoire nous laisse la mémoire de 1789, de 1936, de 1968. Les « acquis » viennent de luttes et de lois imposées par des rapports de force. « Quand l’emportons-nous ? Lorsque les classes populaires se joignent à la petite bourgeoisie culturelle, aux éduqués, à la classe intellectuelle. » …. « lorsque ceux d’en haut ne peuvent plus, ceux d’en bas ne veulent plus, et ceux du milieu basculent avec ceux d’en bas » comme le théorisait Lénine en son temps.
Depuis 1981, il n’y a eu qu’une accumulation des fractures : économique, sociale, géographique, éducative. Cela a éloigné les uns des autres, a isolé chacun-e dans sa souffrance, sa colère, sa désespérance. Le mouvement des Gilets Jaunes a ravivé la solidarité, la fraternité. Youth for Climate a ramené l’écologie au premier rang. Au point de rupture où nous nous situons, les liens se créent, indispensables pour agir efficacement. « Parler aux uns des autres, et aux autres des uns, des façons de voir le monde, des raisons de cela » .
Des années, on nous a bourré le crâne avec concurrence, croissance, compétition, libre-échange, mondialisation, ….mais on a constaté aussi toutes les dérives, les détresses, les conditions de travail, le délitement social, les inégalités et injustices flagrantes et la destruction massive de la planète. La « croissance » ne fait plus le bonheur.




« Sans croissance, pas de redistribution » claironne notre président-banquier, alors que le PIB français est de 2 300 milliards €. Une grosse escroquerie, donc. Relocaliser l’économie, faire des actes pour réduire notre impact par nos multiples petits gestes, nos choix de consommation, énergétique, de déplacement, bien sûr, mais cela ne représente qu’une parcelle minime de ce qu’on enlève de leur domination, car quand on ouvre le frigo ou allume la radio/tv, on se rend compte de leur puissance, leur duplicité, leur hypocrisie. On voudrait nous culpabiliser, mais les avions, les tankers, les camions... « Ils règnent sur les banques, la chimie, les médicaments, les médias, le lait, le cacao, le coton, les cantines, sur l’électroménager, les voitures, les autoroutes, l’ameublement, les supermarchés, la téléphonie, sur les shampoings, les jupes, les tee-shirts, les baskets, sur les mines d’or, d’argent, de cobalt, de nickel, …..ils règnent sur tout ou presque...Ils nous dirigent avec notre complicité, notre docilité, notre servitude volontaire. » Nous savons bien de quelle côté de la fracture nous nous situons. Mais notre force, c’est le nombre. Rapport de force. Alors faisons-le exister à nouveau.
Quel monde voulons-nous ? Pour nous, nos enfants, nos petits enfants ?
« Il faut créer un front commun, un front des communs, ...qu’à la place de nous diviser, l’écologie nous rapproche, rouges, verts, jaunes, qu’elle allie classes populaires et éduquées. » Dépasser les égos, les plans de carrière, « s’unir pour donner d’autres espoirs que l’extrême-droite et l’extrême-argent, duel joué et rejoué depuis trente ans »…. « que cesse la bataille des nains pour qu’on puisse bousculer les géants ».

François Ruffin nous soumet son « rêve » ou prophétie de ce Front Populaire Ecologique.

L’avenir n’est pas écrit…






« Le peuple ne nous en voudra pas d’avoir échoué, 
mais il nous en voudra de ne pas avoir essayé. »
(Roosevelt)







Les textes en italique sont des extraits du livre.


François RUFFIN « il est où le bonheur ? » 
Editions Les Liens qui Libèrent – oct 2019 / 14 €

en vente sur le site du journal Fakir ou en librairie, s’il en reste par chez vous !



vendredi 1 novembre 2019

LE RAPPORT DE FORCE CHANGE QUAND LA JEUNESSE SE MOBILISE


On ne peut que constater que la vague de manifestations mondialisées est le fait de la jeunesse. Vous êtes sceptiques ? Alors, pointons le doigt sur différents lieux où cette contestation est présente :
Algérie, Tunisie, Soudan, Chili, Uruguay, Bolivie, Argentine,Hong-Kong, Liban, Haiti, Barcelone, ...et on pourrait y ajouter France et bien d’autres encore...Le dictateur est chassé au Soudan et remplacé par un gouvernement civil ; Bouteflika est dégagé en Algérie et tout le système militaro-mafieux ébranlé, les peuples n’ont plus qu’une seule arme face aux inégalités, la corruption, la liberté mise à mal, la démocratie bafouée : le nombre.








Et surtout, une jeunesse-génération qui a pris conscience de sa force et fait irruption sur la scène politique.

On disait que cette génération addictive des écrans, iphone et autres jeux vidéos se désintéressait de la politique menée dans leurs pays. Mais les réseaux sociaux abolissent les distances et la mondialisation ne se décline pas que sur une économie libérale dérégulée. L’urgence climatique avec ses conséquences de plus en plus visibles et à répétition est rentrée dans le champ des problèmes majeurs et planétaires. Cela ébranle l’idéologie dominante qui veut nous faire croire qu’il n’y a pas d’alternatives au développement basé pourtant sur l’exploitation des ressources naturelles ...limitées. Un non-sens évident ! La marche forcée et imposée (avec toutes les conséquences sociales ) est  « justifiée » par le seul intérêt financier d’une caste qui cumule les pouvoirs (et les gains) économiques, médiatiques et ...politiques. Tout en sachant que son avenir est limité et va dans le mur au détriment de la survie même de l’espèce humaine. Mais, « après moi le déluge » puisque la vie est éphémère, autant en profiter au max !

La jeunesse, elle, est l’avenir et elle a bien compris qu’il n’y a rien à attendre de ceux qui nous mènent vers une impasse mortifère. Elle a tout autant compris que le champ politique, tel qu’il est conçu, est décrédibilisé par ses excès, ses déviances, ses promesses non-tenues, ses carriéristes…
et que le temps est devenu une préoccupation majeure.
On peut rajeunir les visages des dirigeants, ce n’est pas pour autant que leur politique est « actualisée ». Plus le moment de tergiverser, il faut agir et si les politiques ne le font pas, alors les mobilisations en nombre et  les actions radicales imposeront une pression continue qui changeront le rapport de force et montreront que la répression policière et armée n’arrivera pas à rendre docile une génération qui se réveille lorsqu’elle se détache des écrans et regarde l’état du monde réel. Le futur qu’on lui propose ne semble tout à coup plus si idyllique que le défouloir virtuel, coloré et le leurre de l’existence connectée, mais solitaire.



C’est dans les combats collectifs que l’on retrouve des solidarités, de la chaleur humaine, du sens.
Youth for Climate, Extinction Rebellion, Gilets Jaunes ont en commun un ras-le-bol général et une énergie dirigée vers des changements profonds dans toutes les sphères de la vie quotidienne.
Les réponses entendues ne sont que des ajustements technocratiques qui n’endorment plus personne et l’éveil des consciences est bien à l’oeuvre.

Quand la jeunesse se mobilise en nombre et en radicalité, les « pouvoirs » tombent. Les exemples du passé ne manquent pas, il faut bien en être conscient, convaincu.

                                           


                                                                           L’avenir n’est pas écrit…