Les "divergents", les "résilients", les.... l'ont bien compris depuis un moment.
Il faut se relocaliser sur un territoire, devenir le plus autonome en diminuant ses besoins, échanger en réseaux, changer ses "habitudes" et façons de vivre, de consommer, de faire et ... agir-ensemble.
Le livre (ci-dessous) est un cours universitaire d'économie et il éclaire bien sur l'état de notre monde, les stratégies en cours, et il résonne par rapport aux actualités quotidiennes...
On est passé de la mondialisation libérale, au néolibéralisme et aujourd'hui au capitalisme de la finitude.
J'ai essayé de résumer ces analyses denses et historiques en tirant l'essentiel pour pouvoir appréhender un savoir global.
Bonne lecture.
Le capitalisme de la finitude
est une vaste entreprise navale et
territoriale de monopolisation d'actifs – terres, mines, zones
maritimes, personnes esclavagisées, entrepôts, câbles sous-marins,
satellites, données numériques – menée par des Etats-nations et
des compagnies privées afin de générer un revenu rentier
hors du principe concurrentiel.
Avec la constitution d'empires formels ou
informels par la prise de contrôle de firmes publiques et privées
sur de larges espaces (physiques ou cyber).
Un monde fini (borné, limité) qu'il faut
s'accaparer dans la précipitation.
L'idée d'une croissance globale des
richesses ne fait pas de sens, c'est une course à la saisie qui
guide ceux qui pensent désormais la Terre comme un immense réservoir
de « ressources appropriables ».
Une offre limitée,
pour une demande illimitée.
Une nouvelle vague de mainmise sur le
monde par les puissances industrielles, en compétition armée les
unes avec les autres.
Cette construction théorique et pratique
est venue se fracasser sur les limites écologiques de la planète.
La politique
de « transition énergétique » nécessite une quantité
de ces mêmes « ressources » à un niveau jamais atteint
jusqu'alors.
Le
capitalisme de la finitude est ouvertement prédateur, violent et
rentier.
"Il n'y en
aura pas pour tout le monde".
La rente
n'est pas le profit, elle est un revenu qui provient de la détention
ou du contrôle exclusif d'un actif rare : terre, mine, parc
immobilier, brevet, plateforme digitale, personnes esclavagisées, …
La rente
n'est pas entrepreneuriale, mais patrimoniale, elle est l'horizon du
capitalisme de la finitude, … avec un impérialisme territorial et
souverain.
Un « système
des entrepôts », ...gestion de terres arables, les sous-sols
et les océans, sans passer par des intermédiaires et des prix de
marché.
S'en servir
pour exploiter ou les vider de leurs habitants pour produire des
surfaces touristiques (les « réserves naturelles » ).
Le
capitalisme de la finitude invite au retour d'une approche économique
qui confine à la physique ancienne des éléments :
l'eau (les
océans), la terre (les sols et les sous-sols), l'air ( l'espace et
le cyber), le feu (la guerre).
L' « entreprise
géante » est le moteur le plus puissant du progrès économique
par sa capacité d'innovation, son progrès technique et ses marges
importantes.
C'est la théorie de l'inspirateur du capitalisme de
la Silicon Valley, Peter Thiel, investisseur de Facebook, « faiseur »
de J.D.Vance, le vice-président de Trump, mentor de Mark Zucherberg,
financier d'Airbnb, LinkedIn, Space x, Spotify, ami et ennemi de Elon
Musk. Il infuse son idéologie anti-démocratique et
anti-concurrentielle....et unir le capitalisme américain contre la
« menace » chinoise !
La mondialisation et le libre-échange sont morts.
On va vers une économie connectée entre « amis ».
La Chine contrôle 50% de la capacité minière
mondiale et 85% de la capacité de raffinage.
Créer un réseau d'accords commerciaux plurilatéraux
pour une part et de fournisseurs, de succursales, de mines et
d'usines basés chez des « amis » pour une autre part.
BRI :
Belt and Road Initiative est un projet d'un réseau sino-centré de
pipelines, routes ferroviaires, maritimes, ports, bases navales,
zones franches (concernant 150 pays au monde) avec à la manœuvre le
Parti, les grandes banques et les conglomérats chinois. Le vassal
russe participe à la BRI et l'Ukraine est de ce point de vue un pays
stratégique.
Depuis 2008, dans le monde
américain, on assiste à l'une des plus grandes opérations de
concentration de l'histoire de ce pays. Google occupe plus de 90% du
marché mondial des moteurs de recherche, Microsoft Windows c'est 73%
de part de marché dans les systèmes d'exploitation des ordinateurs
sur la planète.
Amazon c'est 40% de l'e-commerce et en augmentation
avec son « système des entrepôts ».
Quatre firmes contrôlent 80% du marché américain
de la viande, des sodas et aliments pour nourrissons, deux firmes
contrôlent 92% du marché des dialyses ; ...
Les USA deviennent une « autocratie
économique », celle des inégalités triomphantes et des
...monopoles.
L'économie russe est un capitalisme de monopoles
d'Etat.
La Chine est dans l'ère des « mégafusions »
d'entreprises publiques, une stratégie industrielle cohérente pour
la conquête des marches mondiaux.
10 compagnies maritimes contrôlent 95% le transport
de marchandises dans le monde et les 4 géants sont le danois MAERSK,
l'italo-suisse MSC, le français CMA CGM et le chinois COSCO.
En France, la surface des entrepôts de stockage est
de 90 millions de m2.
La
digitalisation et les nouvelles technologies ont porté ces monopoles
à de véritables compagnies-Etat.
Depuis les années 2010,
les câbles sous-marins sont développés par Alphabet (Google), Meta
(Facebook, WhatsApp) et Amazon.
Marseille est le premier hub européen de câbles
sous-marins où passe la majeure partie du trafic internet.
Les milliers de satelittes STARLINK lancés par Elon
Musk et ceux de BLUE ORIGIN de Jeff Bezos (Amazon) sont une autre
infrastructure majeure de transport et de collecte des données. Les
Etats et les firmes dépendent de manière vitale de ces
infrastructures.
Elles sont devenues des acteurs de facto de la
politique étrangère.
Ces nouvelles compagnies-Etat sont les acteurs d'un
capitalisme dans lequel les Etats n'ont plus le monopole de la
souveraineté.
Meta, X et Tik Tok décident eux-mêmes de la
régulation de leurs contenus et par conséquent des limites de la
liberté d'expression en fonction de leurs intérêts et des
situations géopolitiques.
Les monopoles de la technologie déploient une
souveraineté fonctionnelle.
La rente est un « revenu tiré de la
propriété, de la possession ou du contrôle d'actifs rares dans des
conditions de concurrence limitée ou inexistante.
Le succès dépend de ce que vous contrôlez, pas de
ce que vous faites, l'important étant de posséder plutôt que
d'accomplir quelque chose correctement. Il s'agit d'être plus
souverain.
Marx : « là où le capital domine, il
représente un système de pillage ».
L'économie
de rente est de nouveau présente, ces puissances veulent modifier
l'usage des terres des Autres.
Nous entendons un discours
sur la rareté et la finitude,
sur la légitimité à s'accaparer outre-mer des surfaces agricoles,
minières, forestières ou touristiques.
Une spoliation territoriale,
avec la petite musique suivante : les Autres ne savent pas gérer
les ressources qu'ils ont sous la main et cette mauvaise gestion de
leurs richesses est un danger pour l'humanité entière avec la faim
dans le monde, la lutte contre le réchauffement climatique, la
« transition énergétique », les migrations, ... tout
pourrait se résoudre si ces surfaces étaient mieux utilisées !
On s'orne de vertu humaniste pour "justifier" la confiscation des territoires à "ressources".
Depuis 2000, environ 1500 accords - de l'achat à la
location – concernent 8 à 10 millions d'hectares en activité. Les
investisseurs viennent des Etats-Unis, de Chine, des Emirats arabes
unis, de Grande-Bretagne, des Pays-bas, du Brésil et de Malaisie.
Les pays-cibles sont l'Indonésie, l'Ukraine, la
Russie, le Brésil, la Papouasie, l'Argentine, les Philippines,
l'Ethiopie, le Myanmar, le Sud-Soudan et le Ghana.
Les entreprises chinoises louent ou ont acquis 6,5
millions d'hectares dans le monde depuis 2011.
La faim dans le monde a peu de lien avec les
quantités de nourriture disponibles, suffisantes, mais avec leur
répartition et toujours agitée par les décideurs mondiaux.
Il y a
stagnation voire baisse des rendements céréaliers mondiaux et une
consommation protéinique en forte hausse. En 1950, la consommation
mondiale de viande s'élevait à 67 millions de tonnes par an, en
2023, elle s'élève à 320 millions de tonnes ; (porc 37%),
volaille (30%)
Il y a aussi le
développement des agrocarburants produits à base de colza, de soja,
d'huile de palme, de coprah, de jatropha.
La notion de « sécurité alimentaire »
est la tentative toujours croissante de prise de contrôle directe de
terres d'outre-mer par des firmes agro-industrielles publiques ou
privées.
La ruée minière, grande utilisatrice de travail
forcé, est axée sur les métaux. En 20 ans, les volumes de métaux
extraits dans le monde ont doublé.
La « transition énergétique »
(batteries électriques, panneaux solaires, éoliennes) est très
gourmande en métaux (terres rares, cuivre, lithium, nickel, cobalt,
…) tout comme le numérique, l'aérospatiale, l'armement.
Ces mines sont situées dans le Grand Nord canadien,
en Colombie, en Argentine, au Kazakhstan, au Mexique, au Groenland.
Il n'y aura jamais assez de ces métaux pour couvrir le parc
automobile électrique mondial ; il faut donc s'accaparer ces
territoires avant les autres..
L'évolution de la mondialisation d'aujourd'hui
ressemble à l'époque des empires coloniaux des années 1930.
Le Parti républicain (américain, mais on pourrait dire les droites européennes) n'est pas le parti du
néolibéralisme, mais celui du capital oligarchique qui travaille en
tandem avec le nationalisme réactionnaire et xénophobe.
Il s'agit moins de réguler le monde à son profit
que de se replier sur un système économique protecteur et même
autarcique focalisé sur son "silo impérial" (captation des ressources).
L'extrême-droite
européenne avec son obsession xénophobe occulte toute analyse
économique conséquente.
Avec le retour du
capitalisme de la finitude, l'Union Européenne risque fort de se
trouver dans la position de ne pas être complètement pauvre, mais
dépendante du bon vouloir de ses grands voisins et quantité
négligeable sur la scène mondiale. Elle commence à peine à
abandonner son logiciel néolibéral.
Il vaudra mieux pour les grandes firmes européennes
produire aux Etats-Unis plutôt que de tenter d'y exporter.
La création de firmes privées géantes et un
protectionnisme à l'échelle du continent sont les stratégies en
action.
Le déni du changement climatique et la critique des
énergies dites « vertes » sont une inconséquence
majeure.
L' "écologie de guerre" est la façon
dont on pourrait affaiblir un adversaire géostratégique non plus en
projetant des forces armées pour obtenir avant lui ou contre lui des
ressources énergétiques, mais en s'en passant. Sobriété,
économies, énergies vertes...
Pour cela, il faudrait multiplier les sources
autochtones d'énergie et la production domestique des principaux
éléments nécessaires à une économie autonome.
La crédibilité d'une telle politique dépendra de
sa radicalité.
Si elle est forte, il y a une petite chance de sortir
de ce capitalisme de la finitude.
Si elle est faible, elle ne se distinguera pas du
chemin nationaliste et fossile.
Le problème est posé : l'écologie de guerre,
la transition énergétique, le maintien du régime alimentaire mondial actuel,
nécessitent des quantités gigantesques de « ressources ».
Or, le slogan du
capitalisme de la finitude est « il n'y en aura pas pour
tout le monde » !