lundi 17 février 2020

MUNICIPALES : une formalité sans surprises ? **

« Je me représente encore une fois car la liste d’opposition ne saura pas gérer la commune ». « Je me représente encore, car personne d’autre ne s’est signalé et je ne suis pas encore usé(e) ». « Je me représente car j’ai des dossiers-projets en cours et je veux les terminer ». « Je me représente car je suis touché par le cumul des mandats et je préfère reprendre mon ancien poste de maire et laisser tomber les autres mandats plus aléatoires (et donc toi mon adjoint qui m’a remplacé, dégage...) ». « Je me représente car je suis attaché-e à ma commune (je suis disponible,  je n’ai rien d’autre à faire, je connais du monde, ...) »
Bon , on pourrait continuer ainsi à démultiplier les exemples sans trop tomber dans la caricature, car on a entendu tous ces arguments et justificatifs. Mais tous ceux/celles-là sont à côté de ce qui est écrit sur le ponton de leur mairie où ils passent pourtant souvent, sinon quotidiennement : « Liberté, Egalité, Fraternité ».



Quand on découvre des listes municipales où c’est un montage équilibré de façade (des jeunes, des vieux, des blancs, des colorés, des …), on comprend l’objectif : faire plaisir à tout le monde, peu importe la cohérence et les projets. Quand on découvre des listes municipales avec  des gens qui ne vivent même pas de façon permanente dans la commune (mais le week-end, en vacances, dans leurs résidences secondaires), avec des jeunes qui suivent leurs études ou travaillent loin de leur village où ils ne viennent plus qu’épisodiquement voir les parents, des listes épurées de tous ceux qui ont pu émettre des critiques ou des projets autres, alors on est loin de la représentativité collégiale, on est dans un casting passif. Quand les conseils municipaux ressemblent à juste la validation des décisions du maire - voire la validation des décisions de la Com’Com’ du coin (souvent des décisions gouvernementales transmises et à mettre en œuvre)-, on est loin de la liberté de la parole, du débat, d’une autonomie adaptée au territoire.
Les élections devraient être des moments démocratiques pendant lesquels on essaye de trouver un équilibre et quelque chose de vivant, d’inventif. Mais par chez nous, en France, et encore moins en Alsace, terre de conformisme et de légalisme, il n’y a guère de place pour la critique, l’alternative, l’innovation, le changement de fonctionnement, le débat sur des idées nouvelles, l’expérimentation, etc… Bien sûr, il ne faut pas non plus être aveugle, il y a des lieux, des communes différentes où cela existe, mais elles sont si rares et discrètes que personne ne souhaite s’en inspirer, car ça remettrait en cause pas mal d’attitudes et de choix, voire mettre en lumière une certaine incapacité ou indolence.
Avoir une vision pour sa commune, l’intégrer dans un dessein territorial, changer les méthodes pour  une vraie démocratie de construction collective, user du « nous » et oublier le «  je », rassembler toutes les énergies sans tenir compte des a-priori, des différences d’appréciation, s’occuper des communs et non pas des intérêts particuliers, accepter la discussion et penser la mairie comme une maison commune de la citoyenneté. Ce ne sont pas des rêves, des délires, cela devrait être la norme dans une République laïque.
Liberté, égalité, fraternité : quand on franchit le seuil de ce lieu où s’affichent ces valeurs, il faudrait être conscient que cela devrait être un devoir, un souci permanent.
On peut se demander aujourd’hui si les mots ont encore du sens ou si ce ne sont plus qu’un décorum et les personnes élu-e-s des comédiens, plus ou moins bons, dans une pièce sans surprise à laquelle on n’a même plus envie d’assister.
L’état de notre démocratie est au plus mal, cela permet de perdurer, mais engendre aussi des tensions, des frustrations, des colères, de l’indignation et les élu-e-s en sont souvent bien complices par leur passivité et silences.
Cela est vrai depuis pas mal d’années et nous revotons les mêmes personnes ou les même schémas en toute connaissance de cause.
Cela aussi devrait nous interpeller sur notre propre attitude, notre rapport au pouvoir. Pourquoi ?





Une réflexion encore. Quand on présente une deuxième, une autre liste, lors d’une élection municipale par exemple, cela est perçu immédiatement comme une liste « d’opposition ». Pourquoi ? A chaque élection, les cartes sont rebattues, on présente des projets, des idées et aux électeurs-électrices de faire un choix. Si une des listes est l’équipe sortante, elle a un bilan à présenter et des nouvelles perspectives. Elle n’a donc « rien à craindre » sans compter qu’elle bénéficie de la « prime au sortant ». Pour faire un choix, il faut au moins deux listes, sinon c’est quoi un choix ? En continuant sur cette idée, on pourrait très bien imaginer, afin que la démocratie puisse s’exercer, de rendre obligatoire qu’il y ait au moins deux listes par commune. Ainsi, il n’y aurait plus opposition, mais propositions. Cela redorerait la démocratie, non ? A méditer...



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** Mes « textes » sont du débat, des réflexions
    et non pas, je le répète, des affirmations !

Dessin de Pat Thiébaut  67-Still    www.lagitedulocal.com

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