Gouvernement,
analystes politiques, journalistes d'information, syndicats, partis
politiques, ils sont tous bien embêtés pour trouver le bon angle
pour communiquer au lendemain de la mobilisation "gilets
jaunes".
Comme d’habitude
pour ne pas (trop) parler du fond, on reste à la surface en
commençant par énumérer des chiffres : 283 000 participants
sur plus de 2000 lieux, une mort dûe à une automobiliste qui a
forcé un barrage et quelques blessés. Si la communication
officielle est de minimiser la mobilisation, c’est râté. On a
beau entendre que hier, il y avait moins de monde dans les rues que
lors de la loi Khomri (travail) ou des lois sur la retraite, mais on
oublie de dire qu’avec le soutien massif de la population (70%), il
y a une sacré réserve de mobilisation possible. Et puis, la
diffusion des infos, l’organisation sectorielle au travers des
« réseaux sociaux » échappe complètement à un
contrôle étatique. Cette « organisation » souple et
diffuse, disséminée à travers tout le pays, même les coins
reculés, ne laisse aucune prise aux forces de l’ordre (de
répression) qui ne peuvent rien anticiper. Et comme M. Macron a
réduit les syndicats à faire de la figuration, a tué les partis
politiques, il n’a en face de lui plus aucun interlocuteur, aucun
délégué pour discuter, mais il se retrouve en face du « peuple »
avec une côte de popularité au plus bas, à 25 %, c’est à
dire le score réel de son élection. Le chef du gouvernement avait
beau claironner la veille que les manifestants risquaient jusqu’à
4 ans de prison, des milliers d’euros d’amende, cela n’a eu
aucun effet puisqu’il n’y a pas d’organisateur-trice avéré-e
et donc il est difficile d’appliquer des sanctions aux milliers de
personnes. La menace du gouvernement et la suite ont montré que
celui-ci commençait à craindre un soulèvement généralisé sur
tout le pays. Les membres du gouvernement, les journalistes de
propagande peuvent bien clamer que ce n’est qu’une « jacquerie »,
personne n’est dupe, on sait bien que c’est une colère
généralisée, un ras-le-bol profond, puissant et qui laissera des
traces pour la suite. Le ministre De Rugy a beau claironner que la
ligne du gouvernement ne changera rien car c’est de transition
écologique dont il est question (!!!) alors qu’il sait
pertinemment que les taxes prélevées ne vont qu’en infime partie
vers des actions écologiques, que les camions, avions, bateaux (les
plus polluants) sont exonérés de taxes, que les publicités à la
TV regorgent d’incitation à acheter des voitures neuves
(essence-diesel pour la plupart) à des prix inabordables pour les
gens qui peuvent à peine terminer le mois ou pas et à qui on fait
miroiter une prime doublée à la casse dont très, très peu
pourront au final bénéficier.
Les gens ont bien
compris que ces taxes qui se veulent « écologiques » ne
sont que du « green business », des excuses pour
augmenter...les revenus de l’État. Et comme « en même
temps » est supprimée l’ISF (impôt sur la fortune), que le
CICE est largement distribué aux big entreprises sans conditions,
que les plus gros pollueurs ne participent en rien à l’effort
général demandé, qu’en un an il y a 250 000 millionnaires de
plus en France, alors l’injustice sociale est évidente. Il y a eu
une prise de conscience de l’ensemble de la population (75 %)
et aussi un sursaut de mobilisation qui donne un sentiment de
puissance. Si tous les gens qui soutiennent ce mouvement de
ras-le-bol bougent, ce ne seront pas 280 000 personnes qui seront
dans la rue, mais bien plus et ...incontrôlables ! La cellule
élyséenne numérique peut faire ce qu’elle veut, elle n’a
aucune prise sur les « réseaux sociaux », nouvelle arme
pacifique d’information et d’appel à mobilisation avec
géolocalisation. Et comme ces rassemblements sont des groupes de
quelques dizaines, centaines de personnes, il peut y en avoir
partout. On a surtout vu hier des images des villes et périphéries,
mais il manquait celles des campagnes, du milieu rural, où les gens
sont le plus touchés. Une façon encore très centralisée de
montrer les choses.
Car ce n’est pas
que la taxe pétrole qui est contestée, mais l’ensemble des
augmentations qui a diminué de façon drastique les revenus des
ménages. Ce n’est pas pour rien que sont aussi bloqués les accès
aux supermarchés, ces entreprises qui imposent les prix aux
producteurs et les normes de qualité… Ce sont des actes massifs,
collectifs de boycott qui sont une arme réelle entre les mains de
tous, le jour où beaucoup de personnes en seront conscients et
agiront, alors l’économie libérale va vaciller.
Car ne rêvons pas,
que va faire M. Macron et son gouvernement ? Annoncer que
l’essence et le diesel seront ramenés au même prix, que les taxes
d’augmentation prévue l’an prochain seront gelées ...pour un
an, etc....des effets d’annonce sans changements réels. Et compter
sur la « trêve des confiseurs » (période de fêtes de
fin d’année). Il n’est absolument pas envisagé ou même
envisageable que ce gouvernement annonce que le SMIC sera augmenté
de plusieurs points à partir de janvier 2019, que les retraites
suivront l’inflation (et pas en dessous), qu’un coup de pouce
sera donné aux plus basses, que les stages pour les jeunes devront
être rémunérés, que ...bref, vous avez compris, pas la peine de
développer plus car tout cela n’arrivera pas.
Alors qu’envisager ?
Que continuent des actions ponctuelles qui seront vite réprimées,
que la lassitude et le découragement vont l’emporter et qu’on
deviendra soumis et résignés (comme les italiens par exemple). Ou
alors qu’il y aura un vaste mouvement de boycott qui va poser de
sérieux problèmes économiques à un marché qui vit au gain
immédiat, à la plus-value obligatoire, au stocks de marchandises
dans les camions ...à l’arrêt, au blocage de routes sur les
chemins du travail (productif), ….Des actions ponctuelles,
diverses, disséminées peuvent avoir des impacts importants.
A suivre ….L’avenir
n’est pas écrit.
S’il y a une chose
qui a changé ce 17 novembre, c’est bien la notion de rapport de
force entre un Président et gouvernement-députés qui se croient
tout permis en ayant tous les pouvoirs exécutifs et un peuple qui a
pris conscience que en essaimant partout et sans leaders, cela fait
trembler ces technocrates-financiers qui nous dirigent, mais qui
n’ont plus aucun lien avec la vraie vie au quotidien et qui ne
subissent d’aucune façon les conséquences de leurs décisions et
votes.
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