mardi 12 mai 2015

PRIX et VALEURS

"Aujourd'hui, les gens savent le prix de tout et ne connaissent la valeur de rien"
J'aime bien citer des phrases comme cela,  sorties de textes d'auteurs connus ou simplement anonymes. Celle-là est d'Oscar Wilde, mais peu importe, ce qui compte c'est le sens que nous y donnons : prix / valeur !
Bien entendu, je ne vais pas développer ces deux notions car tout le monde leur donne le sens qu'il-elle veut et on comprend très bien ce que son auteur met en avant. Consumérisme, acquisition de biens matériels, amitié, partage...


"Je ne veux pas gagner ma vie, je l'ai " est une citation qui va dans le même sens (Boris Vian) mais l'exprime avec plus d'humour ! Et la notion même de "vie" est très différente selon qu'on ait vingt ans ou soixante, c'est sûr. Pas parce que le temps peut paraître plus réduit, mais surtout parce qu'on est plus sensible à ce qui est important "au final" ou pas, dans la durée et la finalité.
Je n'ai jamais compris qu'on pouvait estimer être dans la démarche d'une vie réussie quand à vingt ans et quelques, on était enceinte, qu'on avait décroché un boulot à la grande satisfaction des parents, qu'on faisait du sport et mangeait sainement, qu'on passait ses vacances au "all inclusive hotel" de Tunisie ou des Antilles..."Comment peut-on déjà à cet âge vouloir s'enfermer dans la prison de la bien-pensance et de la bienséance ?" ***  
"Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait". Il y a une chose cependant qu'on peut faire, c'est partager ses rêves, parler de ses expériences, s'enrichir des "histoires" de chacun-e. ET ça c'est déjà beaucoup. Malgré tout, le regard que je porte sur le monde me fait quand même penser à une sorte de sacrée uniformisation dans ce qui est couramment visible, audible. Et je vois des bimbos reproduites par dizaines, même coiffures, même style de robes, de maquillage, bref des clones ; idem pour les garçons avec leurs coupes convenues, un style classique passe-partout où seules les marques changent (et encore)...Les musiques sont des bpm bien calibrés avec au-dessus des voix toujours dans le même timbre, je ne parle même pas des textes....Voitures (une "caisse"), sorties en "boîtes", travail dans une "boîte" aussi, les mots mêmes définissent bien cette vie cloisonnée ou toute fantaisie se réduit à pas grand chose de divergent ...
Oui, j'ai l'impression qu'on retourne à un formalisme qui date d'avant 68 (dans le siècle dernier) et qui bannit tout écart, tout "étranger" à ce mode de fonctionnement bien rassurant. Si on fait un pas de travers, la condamnation ne se fait pas attendre : vous n'êtes pas le profil recherché, vous faîtes peur car une possible contagion serait une attaque à l'ORDRE bien établi....Celles et ceux dans la survie et qui ne trouvent pas à s'en sortir sont des parias, des fainéants, des "difficiles" quand ce n'est pas tout simplement des inutiles assistés qu'on devrait éliminer, qui doivent sortir du paysage car ça fait tâche...ça interpelle, ça déstabilise, ça fait peur....car ça pourrait arriver aujourd'hui à chacun-e d'entre nous...Si éliminer est trop fort alors on peut les ignorer au moins pour ne pas ternir son mental de "battant". Eh oui, celles et ceux qui regardent leurs salaires comme facteur de réussite et d'intégration pensent avoir raison (l'argent justifie tout aujourd'hui) et ceux et celles qui ne "réussissent" pas sont des faibles et comme dans la nature, les faibles sont bouffés par les prédateurs.
On revient peu à peu à faire croire que le monde est une jungle où chacun-e doit s'en sortir en éliminant l'autre comme dans les jeux vidéos dans lesquels cette génération a été abreuvée et baignée...L'autre devient un possible ennemi, un adversaire, un concurrent...
Quand on parle d'économie collaborative, d'échanges d'information pour construire des projets communs, de réfléchir dans la durée et au bien commun avant de produire, de tendre vers plus d'autonomie alimentaire, énergétique, là c'est prendre des risques de passer pour un extra-terrestre, un doux rêveur qui fume la moquette, un agent de l'ennemi, quelqu'un hors du "réel" qui n'a aucun sens de la vie...




Il faut juste espérer que cela ne finira pas en affrontements guerriers tant les souvenirs d'il y a moins de cent ans sont encore présents dans la mémoire des plus anciens. La guerre pour les plus jeunes est comme un jeu vidéo où les morts sont à nouveau debout quand on entame une nouvelle partie. Là par contre les "rêveurs" ne sont plus les mêmes et surtout ils deviennent sourds quand on leur dit, démontre qu'une certaine façon de vivre ici engendre forcément des conflits armés dans une autre partie de notre planête...

Alors, oui nous connaissons le PRIX des choses, mais quelles sont encore nos VALEURS ?



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***   in "Génération H / têtes chercheuses d'existence "  Alexandre Grondeau -roman / éditions La lune  sur le toit

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